A la suite d’Abhijata qui a lancé une convention européenne en ligne fin mai, Prashant Iyengar enseigne en ligne tous les week-ends de juillet
Dimanche 5 juillet était Guru Purnima : la pleine lune consacrée à l’hommage au guru. Prashant a rappelé que premier et ultime guru est à l’intérieur. Très inspiré par les métaphores informatiques, mises en exergue avec la pandémie, il nous a invité à établir une “hotline” avec le guru, en nous-mêmes, et à la garder active tout au long de nos pratiques. En ces temps difficiles, nous ne pouvons plus nous satisfaire d’une approche superficielle, mais pénétrer plus avant pour explorer les aspects cachés restés jusque-là inaperçus… Ce qui implique de nous confronter à nos difficultés pour continuer notre propre “éducation”, développer notre intuition, et étendre notre degré d’intégration. Le yoga est un processus d’exploration.
Il y a une grande différence entre les “postures” et les “yogasana” ou “postures de yoga : les premières sont des images figées de formes posturales ; les secondes sont des actions contemplatives coordonnées et intégrées non “photographiables”. Il est important de ne pas les confondre : quand on pratique et également quand on enseigne ! Le professeur qui montre la posture en silence et explique les points techniques à ses élèves donne des repères pour reproduire une forme visible. Mais ce que l’élève doit mettre en œuvre pour lui donner vie est un processus cognitif complexe qui implique son corps, son souffle, son attention éveillée, sa sensibilité, son imagination, son intention spécifique en accord avec sa condition, sa maturité et son niveau d’entrainement. Cette expérience est unique, et ceci, à chaque fois. Il ne peut donc y avoir de pratique “standard”. Aussi bien, ce qui est “fait” à l’intérieur reste caché. Le yoga lui-même est le but du yoga : entrer dans ce processus de connaissance qui éclaire peu à peu nos zones d’ombre et les intègre une à une. Se focaliser sur la réalisation de “postures” est donc une motivation très limitée qui pourrait faire manquer la vue d’ensemble : la quête de la fluidité, de la liberté et de la sagesse.
La mise en place “physique” et “pragmatique” de la posture est fondamentale : faite, ici pour le corps, elle tient compte des conditions internes et externes pour ajuster point par point selon l’intention, la séquence et le timing (durée, nombres de cycles…) – c’est la phase de câblage du “hardware”. Sur cette base, une deuxième phase intervient : la posture est faite, ici, pour le souffle, en observant l’inspiration, l’expiration “normales” dans cette forme posturale, puis en le rendant , par notre observation réflexive, de plus doux, sensible, fin, lent, raréfié – autrement dit Ujjayi – à plus vif et plus profond pour toucher le plan organique / énergétique. Ainsi, la troisième phase qui a pour but de ramener l’esprit vers l’intérieur : vers “yoga-citta-vrtti-nirodhah” peut être mise en œuvre. Le but du yoga est l’intégration. Exécuter des postures “photogéniques” de façon martiale, bloque en réalité la libre circulation du souffle et aussi bien le processus cognitif d’intériorisation – puisque l’attention est sans cesse ramenée vers l’extérieur pour ajuster [grossièrement] la posture en perdant sa dimension méditative. Guruji ne pratiquait pas ainsi. La géométrie externe des postures de Lumière sur le yoga est une référence visuelle de postures “optimales”, réalisées pour être figées dans un livre. Le yoga est une quête intérieure qui doit toucher successivement tous les plans d’expérience du plus dense au plus subtil. Le “hardware” de la posture physique est indispensable, mais nous ne pouvons nous limiter à un “touch and go” pour mettre “dans la boîte” des clichés à poster sur Instagram. Nous devons aussi mettre en place le “software”, explorer et évoluer dans notre approche, pour sculpter non seulement notre corps mais aussi notre esprit. Sinon, ce n’est pas du “yoga” : l’union – où l’action culmine dans la contemplation.
à suivre…